INTERVIEW D'AMJAD EL KHATIB, DOCTORANT LIBANAIS
Découvrez Amjad EL KHATIB, doctorant libanais
D'où venez-vous ? Pouvez-vous vous présenter rapidement ?
Je m’appelle Amjad El Khatib, j’ai 33 ans et je viens de Kalamoun, une petite ville du nord du Liban, située entre la mer et la montagne. J’ai obtenu un master en Technologie des systèmes médicaux et industriels (TSMI) et un diplôme d’ingénieur en génie industriel en 2014, avec des cours dispensés en français. Par la suite, j’ai travaillé comme chercheur à l’Université libanaise américaine, où j’ai publié un article sur la sécurité des véhicules autonomes dans une conférence IEEE au Canada. J’ai ensuite occupé divers postes en Arabie saoudite : chef de projet ingénieur en systèmes de sécurité pendant six ans, puis chef des ventes dans une entreprise spécialisée dans les systèmes d’éclairage.
Après une pause dans mes recherches pour des raisons familiales, je suis venu en France comme touriste en janvier 2022. Pendant ce séjour, j’ai décidé de passer un entretien pour devenir doctorant, et j’ai commencé ma thèse en septembre 2022. Actuellement, je mène des recherches en génie industriel et génie hospitalier, et je soutiendrai ma thèse en 2025.
Si vous deviez présenter votre pays d'origine, que diriez-vous ?
Le Liban est actuellement confronté à des défis politiques et économiques majeurs, mais c’est un pays magnifique par son climat, sa nature et ses nombreux sites historiques. C’est un petit pays où la mer et la montagne sont à proximité, et où règne une grande diversité religieuse et culturelle.
Pourquoi êtes-vous en France ?
Je suis venu en France pour poursuivre mes recherches, développer un réseau professionnel et travailler dans un environnement qui offre plus d’opportunités dans de meilleures conditions.
Qu'est-ce que la France représentait pour vous ? Quelle vision/image aviez-vous avant de venir ?
Je voyais la France comme un pays doté d’une belle nature, où les droits de l’homme sont mieux respectés qu’au Liban. J’associais aussi la France à une grande richesse en matière de recherche, grâce à ses nombreux centres spécialisés, et à une image romantique et accueillante.
Qu'est-ce qui vous a le plus surpris à votre arrivée ?
Ce qui m’a surpris positivement, c’est l’abondance de nature et la bienveillance des gens. J’ai été marqué par la facilité à communiquer et les sourires spontanés des inconnus.
En revanche, j’ai été étonné par la lourdeur des démarches administratives. Ayant vécu en Arabie saoudite, où tout est numérisé et rapide, je trouve les procédures françaises très lentes.
Quelles sont les plus grandes différences entre votre pays et la France ?
Les droits humains : Ils sont bien plus respectés en France.
L’éducation : En France, l’école publique est de qualité et accessible, contrairement au Liban où les écoles publiques disposent d’un niveau très bas, ce qui contraint certaines familles à inscrivent leurs enfants dans des écoles privés et payantes dès la maternelle.
Les aides sociales et la prise en charge sanitaire : Ces dispositifs n’existent pas au Liban, où les habitants doivent tout financer eux-mêmes.
Qu'est-ce qui est le plus difficile dans le fait d'étudier en France ?
Le plus difficile a été de prendre la décision de tout quitter pour venir en France et poursuivre mes recherches, en jonglant avec mes responsabilités familiales.
Est-ce que le fait d'être en France a changé votre regard sur votre pays d'origine ?
Mon regard sur le Liban n’a pas changé. Je pense toujours que c’est un pays où il est difficile de vivre et d’évoluer professionnellement, et cela s’est aggravé avec la crise actuelle.
Est-ce que le fait d'être en France a changé votre regard sur la France ?
Mon expérience a plutôt confirmé l’image positive que j’avais : une nature omniprésente, une proximité avec les gens et un souci de l’autre. Tout ce que je vis ici correspond à ce que j’attendais.
Qu'est-ce que vous appréciez le plus en France ?
J’apprécie la culture commune entre le Liban et la France, héritage historique de la présence française au Liban. J’aime particulièrement la communication et l’entraide entre les gens : ici, les inconnus sont souriants et bienveillants, ce qui est très différent de mon expérience en Arabie saoudite, où les relations sont plus individualistes.
J’aime aussi que la famille ait une place importante en France, à côté du travail. En Arabie, c’est l’inverse : le travail passe avant tout, avec peu de considération pour la vie personnelle. Par ailleurs, la liberté de déplacement en France est précieuse. En Arabie, il fallait demander l’autorisation à son entreprise pour quitter le territoire, et certaines entreprises confisquaient même les passeports des employés dès leur arrivée.
Cette expérience internationale vous a-t-elle changé ? Si oui, en quoi ?
Oui, elle m’a permis de devenir plus tranquille et moins stressé. En Arabie, il y avait beaucoup d’incertitudes professionnelles et peu de stabilité, ce qui rendait la vie stressante. En France, les conditions de vie sont meilleures : je peux prendre des congés pour passer du temps avec ma famille, et mes priorités ont changé. Je privilégie désormais ma vie familiale sur ma vie professionnelle, à l’inverse de ce que je faisais auparavant.